Les cheveux châtains, mince, deux étoiles et deux anneaux brillant à l'oreille gauche, un bracelet peace and love au poignet, Ringo Starr est souriant derrière ses inamovibles lunettes noires. À 67 ans passés, l'aîné des Beatles (il avait trois mois de plus que John Lennon) rencontre la presse européenne dans les bureaux d'EMI à Londres. L'historique maison de disques du plus grand groupe au monde se flatte du retour dans son giron du batteur et chanteur, une éternité après son dernier disque sous son logo rouge et blanc, l'album Goodbye Vienna, en 1974. La sortie de Liverpool 8, le nouvel opus de Ringo Starr a de quoi mettre du baume au cœur d'une major qui vient d'annoncer encore 2 000 licenciements dans son personnel et qui a perdu, l'année dernière, l'autre ancien Beatles, Paul McCartney, qui a décidé de faire distribuer son dernier disque par les cafés Starbucks et par la major Universal.
L'exercice n'est pas facile : comment parler à Ringo Starr sans lui parler des Beatles et comment parlerait-il de son disque sans parler des Beatles ? Car l'album Liverpool 8 porte le nom de l'arrondissement postal du 9, Madryn Street, maison natale de Richard Starkey. La chanson qui porte le même titre et ouvre le disque revient sur une biographie à la fois banale et hors du commun : l'enfance sans histoire d'un môme d'un quartier prolétaire, qui rêve de musique, passe cinq semaines dans la marine marchande et quelque temps à la chaîne dans une usine avant de gagner sa vie comme musicien de groupe en groupe, jusqu'à ce que l'on fasse appel à lui pour remplacer le batteur des Beatles… «Une chanson un peu nostalgique, explique Ringo Starr. C'est ma vie, voilà. Ça ne se planifie pas, mais il était temps de faire cette chanson.»
«J'aime toutes les libertés»
Il se trouve aussi que Liverpool est capitale européenne de la culture pour l'année 2008, et l'a accueilli le deuxième week-end de janvier pour le grand concert d'inauguration de cette année exceptionnelle. L'occasion d'un retour au pays pour un citoyen britannique installé depuis les années 1970 aux États-Unis. « C'était bien d'être au centre de toute cette excitation. La ville change, comme toutes les villes. Aujourd'hui, on pense que Liverpool est surtout la ville des Beatles, mais c'est beaucoup plus que cela. Il y a plus de galeries d'art, les musées sont plus grands. Il y a des poètes, des sculpteurs… Mais, de toute façon, c'était déjà une capitale culturelle, à sa manière, à cause du port. Les marins apportaient la musique d'Amérique, et nous avons été les premiers à avoir le rock'n'roll et à connaître Little Richard. » Il n'est pas retourné voir sa maison natale qui, à la suite d'une pétition, sera la seule conservée de Madryn Street en voie de destructionite. Mais il a visité l'école qui a remplacé celle qu'il a connue et qui est installée maintenant sur le Starr Field. « Ma femme dit que je n'ai pas perdu mon accent de Liverpool. Mais ma mère disait que je l'avais perdu.»
En tout cas, il revendique la fidélité à ses idéaux de jadis. « Je viens des années 1960, je suis toujours love and peace. J'aime le flower power, j'aime toutes les libertés, même si ça n'a pas duré. J'ai toujours le rêve qu'une minute, un jour, une année, tous les humains sur cette planète soient dans la paix et dans l'amour. L'amour et la paix sont au centre de ce disque : nous avions beaucoup d'idées de chansons, mais on n'a enregistré que les morceaux sur lesquels on pouvait mettre le mot “amour ”.»
Cette fidélité-là compte au rang de ses fiertés. Il essaye de résumer : «La vie est vaste, la musique n'est pas toute la vie. Mais, musicalement, il y a quelques disques dans lesquels j'ai bien joué. Rain, Come Together, quelle que soit la chanson que vous preniez, j'étais très bon dedans. » Les Beatles, forcément… «Je suis fier des Beatles, évidemment. Le problème est que, quand on sort un nouveau disque, on vous en parle deux minutes et arrive une question sur les Beatles.» Ce qui explique peut-être la manière abrupte dont, lors de la conférence de presse de lancement de l'année européenne de Liverpool, il a rejeté l'idée de jouer avec Paul McCartney. Il est plus disert sur son fils Zak Starkey, qui lui a donné la joie d'être grand-père et qui est devenu à son tour un batteur très respecté.
«Il y avait une batterie à la maison et, naturellement, il s'est assis derrière. Je lui ai donné une leçon et, quand j'ai voulu lui donner la deuxième, il a dit : “Je sais le faire”. Je lui ai dit : “OK, tu as 10 ans, tu sais ce que tu fais.”» Ringo lui a présenté plus tard son copain Keith Moon, le batteur des Who, avec qui son fils vient de faire une tournée mondiale. La tournée de M. Starkey père, avec la nouvelle mouture de son All-Starr Band, commencera cet été aux États-Unis. Les éventuelles dates européennes n'ont pas encore été annoncées.
Bertrand DicaleBeatles-Mania.com est articulé par Muzilab™ Divertissement | Privacy policy © 2024